«Jésus fut enlevé au ciel et s’assit à la droite de Dieu». (Mc 16, 15-20)
Ces jours-ci, on a vu la flamme olympique arriver à Marseille. Un spectacle extraordinaire mettant en vedette le Belem, dernier trois-mâts barque français à coque en acier, datant du 19e siècle. Une grande fête populaire, avec plus de 400 000 personnes réunies pour accueillir une simple flamme qui va maintenant faire le tour de la France, jusqu’en Polynésie française, avant de terminer sa course à Paris pour l’ouverture des Jeux olympiques 2024.
Jésus aussi est venu allumer un feu sur la terre et il a réussi, même si parfois on a l’impression que, comme la braise, il couve sous la cendre. On sait combien pendant les grandes sécheresses de l’été, un rien peut rallumer un incendie de forêt. Jésus a voulu s’entourer de disciples qu’il a instaurés comme porteurs et porteuses de ce feu sacré pour le garder vivant et le transmettre après lui.
En ce jour de l’Ascension, il nous est demandé si nous acceptons de porter à notre tour de ce feu d’amour, à la fois fragile et puissant. Aujourd’hui, c’est comme si nous recevions la flamme de la Bonne Nouvelle allumée par le Christ il y a 2000 ans. Elle est restée vivante à travers tous ceux et celles qui nous ont transmis la foi, nos pères, nos mères, nos grands-parents. À travers elles et eux, c'est encore et toujours le Christ qui nous la confie.
C’est aux croyants et aux croyantes d’aujourd’hui de la garder bien haute et allumée, en vue de la grande fête qui se déroulera un jour dans son Royaume, avec son Père et tous ceux et celles qui nous ont précédés dans cette longue course à relais.
Cette flamme brillera tant que nous la garderons allumée en nous et que nous contribuerons à communiquer l’amour du Christ à notre monde, par des gestes concrets d’entraide, de solidarité, de justice, de pardon et de réconciliation.
Illustration : « L’Ascension du Christ, Pietà », par Salvator Dali (Huile sur toile, 1958, Collection Pérez Simon, Mexique).
Cette représentation de l’Ascension du Christ montre le Christ en lévitation au-dessus des spectateurs et spectatrices que nous sommes. Placés directement en dessous de Jésus, nous l’observons s’élever vers son Père. Il semble quitter ce monde. Artiste et mystique, Dali a été très ébranlé par les explosions d’Hiroshima et Nagasaki et par un « rêve cosmique » fait quelques années auparavant. Il s'en inspire souvent dans son art.
Ici, du Christ, on ne voit pas le visage. Il s’élève en position de crucifixion, vers un noyau atomique, composé de particules agglomérées, ou un soleil, représentant son esprit unificateur. La ligne d’horizon très basse fait apparaître un paysage maritime, probablement Port Lligat, où vit l’artiste. Au sommet du tableau, la Vierge Marie, représentée sous les traits de Gala, la muse du peintre, pleure la Passion de son fils, à l’instar des Vierges flamandes. Juste au-dessous d'elle plane l’Esprit Saint sous forme de colombe. Ses ailes déployées font jaillir des rayons qui semblent tracer le chemin introduisant le Christ dans l’espace céleste. Le passage de l’espace maritime à l’espace céleste entre le bas et le haut du tableau symbolise celui de la Pâque, qui est une traversée (de la mer Rouge par Israël et de la mort par le Messie) jusqu'à la Lumière impérissable du Royaume de Dieu, auquel le Christ introduit l’humanité par sa Résurrection et son Ascension.
Ce tableau est un concentré de symbolique. Singulier ou très original, pour dire le moins, il invite à découvrir la profondeur de l’événement de l’Ascension et son lien avec tous les événements qui ont précédé. Pour Dali, l'accès à la gloire du Ciel, que nous fait espérer l’Ascension, n’est possible qu’après le passage par la mer des douleurs de la Passion.
Pour ma part, voir le Christ s’élever ainsi au ciel me rappelle qu’il ne sera plus présent en notre monde qu’à travers l’Esprit Saint qui anime chaque baptisé-confirmé et qui construit chaque communauté chrétienne. Depuis l’Ascension, les pieds, les mains, les bras, le cœur du Christ, c’est nous qui leur donnons vie, puisque nous avons été greffés à lui par le baptême. C'est le sommet de l'Incarnation: en son Fils, Dieu s'est fait homme dans notre monde, pour que quelque chose de notre monde et notre humanité retourne en Lui, par le Christ, en qui nous sommes maintenant unis. L'Ascension, c'est le début de la nouvelle présence du Christ en ce monde, et de notre nouvelle vie en Dieu.
Bon temps pascal et bonne fête des mères!
Claude Pigeon